Définition shemale

Le mot shemale est un terme anglais apparu au cours du XXᵉ siècle, aujourd’hui considéré comme problématique, voire insultant, dans la plupart des contextes. Littéralement, il combine she (elle) et male (homme), ce qui traduit déjà une ambiguïté volontairement stigmatisante. Le mot a longtemps été employé dans l’industrie pornographique pour désigner des femmes transgenres, souvent réduites à leur corps et à leur sexualité, et non reconnues dans leur identité de genre. C’est ce caractère réducteur et objectifiant qui explique que le terme soit désormais rejeté par la communauté trans et par la majorité des acteurs institutionnels ou universitaires travaillant sur les questions de genre.

On retrouve des traces écrites de ce mot dès les années 1960 dans des magazines américains, mais c’est surtout dans les années 1980 et 1990 qu’il s’est imposé dans le vocabulaire pornographique en ligne et sur cassette vidéo. Dans ce registre, il s’agissait d’une catégorie marketing, destinée à titiller la curiosité d’un public masculin consommateur de pornographie. Cette diffusion commerciale a contribué à enfermer les femmes trans dans une image hypersexualisée, réduite à une curiosité érotique. De nombreux chercheurs, comme la sociologue américaine Julia Serano, ont souligné que ce terme illustre parfaitement ce que l’on appelle la trans objectification, c’est-à-dire la tendance à nier l’identité des personnes trans pour ne les envisager qu’à travers une grille fétichisante.

Dans le langage courant, shemale n’a jamais été neutre. Utilisé hors du cadre pornographique, il a souvent pris une valeur injurieuse, une façon de rabaisser ou de discréditer une personne transgenre. Les associations de défense des droits LGBT, telles que GLAAD aux États-Unis, considèrent le terme comme un “slur”, autrement dit une insulte, au même titre que d’autres mots historiquement employés pour stigmatiser les minorités. Sur Wikipédia ou dans les dictionnaires contemporains, le terme est systématiquement signalé comme offensant, avec la recommandation de lui préférer des expressions respectueuses telles que “femme transgenre” ou simplement “femme trans”.

Cependant, l’histoire des mots montre qu’ils ne sont pas figés. Certains militants trans ont parfois tenté de réemployer shemale de façon ironique ou revendicative, à la manière dont certains groupes réinvestissent des insultes pour les retourner en signe de fierté. Ces tentatives restent marginales et controversées, car la charge péjorative demeure très forte. La majorité des personnes concernées rejettent ce terme, précisément parce qu’il rappelle un imaginaire de marginalisation et d’exploitation commerciale.

Aujourd’hui, shemale continue de circuler sur internet, principalement dans des contextes pornographiques ou sur des forums anonymes. Il reste associé à un univers de consommation et non de reconnaissance identitaire. Dans la presse généraliste ou les publications scientifiques, son emploi est quasiment inexistant, sauf lorsqu’il s’agit d’analyser l’histoire des représentations trans ou de critiquer les stéréotypes sexistes et transphobes.

En définitive, shemale est un mot qui désigne une réalité linguistique et culturelle marquée par l’exploitation et la stigmatisation. S’il est nécessaire de le définir pour comprendre l’histoire des discours sur la transidentité, il ne doit pas être employé pour désigner une personne de manière respectueuse. Son intérêt aujourd’hui est surtout historique et critique : il nous rappelle comment les mots peuvent enfermer les individus dans des images dévalorisantes, et combien il est important de faire évoluer notre vocabulaire pour mieux refléter la dignité et la diversité des identités.