Définition tosser

Verbe d’argot, souvent glissé dans une phrase à la volée, tosser appartient à cette famille de mots un peu rugueux, qui sentent la rue ou les films policiers d’une autre époque. Il peut désigner le fait de voler, de piquer quelque chose, généralement sans violence, parfois même sans que la victime ne s’en rende compte tout de suite. C’est un mot qui suggère un geste rapide, un coup de main discret. Un mot d’action.

On entend parfois “il s’est fait tosser son portable” dans une bouche qui ne s’embarrasse pas de formalisme. Tosser, c’est arracher au quotidien un petit bout de ce qui ne nous appartient pas. Ce n’est pas forcément noble. Pas non plus franchement dramatique. Le mot flotte entre la délinquance mineure et la blague potache. Il peut désigner une bousculade dans un vestiaire autant qu’un vol à l’étalage dans un supermarché.

Il y a des mots qui tapent, d’autres qui glissent. Tosser fait partie de ceux qui semblent appartenir à une époque bien précise, même s’ils continuent d’exister à la marge. On le croise parfois dans des textes de banlieue, des dialogues de série, ou dans une conversation entre potes. Il fait sourire ou lever un sourcil. Parfois, on demande ce que ça veut dire. Ce n’est pas un mot qu’on apprend à l’école.

Et puis il y a ce son, cette consonance sèche. Tosser, c’est court, efficace, presque brutal. On entend le “t” claquer, le “ss” frotter. Le mot semble taillé pour la discrétion tout en étant bien présent. Il n’y a rien d’élégant dans le geste qu’il désigne, mais il y a un certain style dans la façon dont il est dit. Comme si le langage lui-même se faisait complice d’un petit délit.

Ce qui frappe, c’est que tosser est rarement utilisé seul. Il s’accompagne presque toujours d’un complément : tosser un portefeuille, se faire tosser un sac. C’est un mot qui appelle un objet, une victime. Il vit dans la relation. Et cette relation est, par nature, déséquilibrée. Quelqu’un prend, quelqu’un perd. Mais l’histoire s’écrit sans fracas, sans effraction. Une tension douce.

Il arrive aussi que le mot prenne une tournure plus imagée. On peut dire qu’on s’est “fait tosser” pour exprimer qu’on a été roulé, manipulé, presque floué. Là, le mot déborde du cadre du vol et touche à la tromperie. Le langage populaire aime ça : faire glisser un mot d’un usage concret vers une métaphore vivante. On commence dans la rue, on finit dans la psychologie.

Certains diront que ce genre de mot devrait disparaître. Trop vulgaire, trop daté, trop marginal. Mais ils ont tort. Tosser a sa place dans l’argot, dans le parler vrai. Il sert à dire ce qu’on ne peut pas formuler autrement, ou du moins pas avec autant de rythme. Il garde une fonction de signal : quelque chose a été pris, volé, échappé. Il y a un manque, et le mot le marque.

Ce n’est pas le plus beau des verbes, ni le plus noble. Mais il existe, et il vit, là où le langage officiel ne s’aventure pas. Tosser, ça sonne comme un mot qu’on jette, qu’on lance. Et c’est sans doute pour ça qu’il reste, en bordure du français, entre le réel et le récit.